dimanche 18 août 2019

De Charybde en Scylla

Un billet invité et à fleur de peau de Isa-Glm Vg Wende.
Merci Isa.



« Nagez tout près des dauphins », suggéré par une gamine qui ne sait toujours pas nager seule sans brassards dans son «rêve éveillé», miraculeusement seule sans encadrement, en superposition virtuelle de dauphins miraculeusement là pour elle, le consternant rhabillage marketing ne permettant en fait même pas ! de barboter en maillot dans le même marigot que les esclaves marins.

Une rapide recherche internet, montre aisément qu'en fait Marineland empiète sur le créneau de «nage» avec les dauphins libres... versus des dauphins en boîte en sursis vital, fournis aux paresseux sur un plateau, telle la tête de Jean Baptiste par le roi Hérode sous le charme d'une cruelle écervelée adepte de la danse.

Certes le terme «nagez» est plus sujet à caution, que le «tout près», supposé implicitement compréhensible (à part par des enfants naïfs qui trépigneront d'impatience puis de déconvenue, et par des autistes Asperger dont la captation des sous-entendus n'est pas le fort) comme «selon mesures de sécurité, dans la mesure du possible mais vous comprenez pour des raisons d'hygiène, on est des gens responsables blabla...»
(Le pseudo-sérieux couvrant surtout un service juridique fort inquiet d'un quelconque incident pouvant déboucher sur de coûteux dommages-intérêts, en particulier d'une clientèle étrangère procédurière, et de l'impossibilité de prémunir leur fond de commerce de contaminations infectieuses en faisant défiler à la chaîne des lucratives charretées de clients pressés.)

Malgré des assertions de «domesticité*», invoquer clairement le danger serait un aveu implicite que des bêtes sauvages, de taille massive par rapport à un mioche qui plus est, restent imprévisibles malgré le dressage intensif de la conduite à tenir et le conditionnement d'obéissement à l'humain obtenu dès la naissance, l'avantage relatif d'un élevage artificiel permettant cependant de clamer qu'ils n'ont rien connu d'autre que ces murs de béton et un nourrissage sans avoir à chasser.

Seulement, bien que je n'en sois pas fière désormais, «nager avec les dauphins» - en piscine de mer(de) - mon fils l'a vraiment fait il y a une quinzaine d'années en littoral d'une île méditerranéenne (je ne dirai pas où), et ça n'a RIEN à voir avec cet ersatz...

La grand-mère était persuadée que son petit-fils adorerait, c'était son cadeau sincère et coûteux, bien entendu je ne conteste pas sa délicate et gentille attention.
On y a bien entendu également payé les photos de photographe-maison plein cadre au bord du bassin, les yeux de la tête, en supplément de l’«attraction» privée, comprenant des entrées pour toute la famille massée dans les gradins avant l'heure d'ouverture au public...

Cela me répugne de - en un sens - faire de la pub pour «ça» ! cependant l'hygiène et la sécurité, pour une «prestation» correspondant réellement à leur publicité, là-bas ils savaient faire !

Outre l'obligation de comprendre l'anglais dans lequel s'exprimerait le personnel d'encadrement, ou bien d'avoir près de soi un traducteur, outre la signature d'un engagement écrit stipulant l'obéissance absolue aux consignes de sécurité et d'hygiène demandées sous peine d'exclusion immédiate sans remboursement, outre la déclaration préalable de savoir nager, outre l'âge minimal requis de 8 ans, outre la douche savonneuse totale obligatoire avant et après le passage dans la zone réservée normalement interdite au public, de tous les participants (par petits groupes de 8 touristes et leurs éventuels accompagnateurs, un par matinée) ainsi que la fourniture d'une serviette et de claquettes neuves remportées comme souvenir à l'estampille de ce zoo marin (car hélas y étaient également emprisonnées diverses espèces pour égayer le touriste et décorer les lieux entre deux maigres palmiers), le «sérieux» de l'entreprise allait jusqu'à assister obligatoirement à un long briefing préalable accompagné d'un documentaire pédagogique sur la vie des dauphins libres sans balivernes plaquées des dauphins captifs (ex. espérance de vie, contrairement aux salades servies au visiteurs marinelandesques).
Soyons honnête, ils se sont bien gardés de préciser la provenance de leurs dauphins, comme personne ne s'est avisé d'en formuler la question, ça tombait plutôt bien.

Or j'en pleure encore, d'avoir lu des années après que c'étaient des dauphins sauvages capturés en Mer Noire et dressés, et en prime, ils en étaient à leur seconde équipe la première ayant crevé... et je me mettrais des claques du leurre de ce qu'on croit voir dans ce qu'on veut voir : en fait probablement inquiets de recevoir une sanction de n'avoir pas effectué correctement l'injonction, ces obéissants animaux avaient l'air tellement «concernés par leur tâche» (ah oui ?!), au point de revenir (spontanément ?!) chercher la petite fille qui n'avait pas réussi à s'accrocher à leurs ailerons quand deux d'entre eux passaient de chaque côté d'elle pour le «tour» prévu d'être tiré à toute vitesse à l'autre bout du (minuscule) bassin joliment ensoleillé (bref sans ombre)...

Tout était rigoureusement propre, bien sûr ça avait l'air «petit», «quand même», mais le gamin avait des étoiles dans les yeux (et toute la journée il est resté comme un zombie, refusant de se rincer pour garder l'odeur poissonnée sur lui - lol les bouts de poissons morts loupés par les dauphins marinant dans l'eau salée finissent quand même par pourrir vite sous le soleil implacable...).

Si peu d'objections à peine surgies, noyées aussi sec (!) dans le feu du «merveilleux» et de l'«exceptionnel», par le tsunami de l'égoïsme paternaliste, envers nos cousins marins, et surtout, de l'excuse suprême du «bonheur enfantin»... sans se demander quelle «vie» était réellement laissée à ces pauvres animaux, jour après jour sollicités sans aucun libre-arbitre pour ces odieuses clowneries futiles et serviles, avec l'abject alibi de mieux les connaître «de près»... eux n'y gagnent en revanche vraiment, mais alors vraiment rien ! à nous connaître ainsi !!

La petite soeur, trop petite, enviait son frère mais elle ne savait de toutes façons pas bien nager à l'époque même si on avait triché sur son âge...
Mais elle n'ira jamais : c'était la dernière fois qu'elle mettait les pieds dans un delphinarium.

Nos quelques approches suivantes de cétacés (dauphins, globicéphales) lors de vacances à l'étranger ont été via des sorties côtières de whale-watching, autant que se pouvait «respectueuses» en choisissant une enseigne non tapageuse (ni musique tonitruante à bord ni publicités agressives), en petit comité (en fuyant les gigantesques bateaux remplis de fêtards imbibés à la bière), avec discussion préalable permettant de tester la mentalité des opérateurs.

Mais même «comme ça», même «libres», ils ne le sont pas vraiment, harcelés jour après jour par des bateaux remplis de touristes désœuvrés avides de sensations, d'images et d'occupation - certes jamais les mêmes, pour ces «simples visiteurs» c'est «exceptionnel», mais pour les dauphins c'est tous les jours... Je comprends maintenant que ça les dérange éhontément, que l'arrêt spontané du groupe de globicéphales pour que le seul petit tête, scène «adorable» devant laquelle tout le monde s'extasiait, devant laquelle le bateau avait bien évidemment également stoppé sa course dans les vagues - au risque que le bateau chavire lorsque tout le monde s'est, bien évidemment, précipité au bord du même bastingage - était une scène familiale privée, violée par le voyeurisme outrancier du spéciste lambda qui s'ignore.
Nous n'y avons jamais «nagé» avec eux, et ni eux ni nous ne s'en portent plus mal...

De Charybde en Scylla, du harcèlement quotidien à la captivité à perpétuité, se divertir en condamnant d'innocents habitants planétaires à l'ennui profond entrecoupé de pénibles obligations inutiles pour eux et des pitreries grotesques, quelle est notre réelle légitimité pour leur infliger ces traitements in-humains ?!
Celle de l'argent sale ?

«Comme ça» est-ce vraiment «moins pire» que «ça»? (tout «bien» selon des critères aveugles à la condition dramatique d'êtres supérieurement intelligents futilement dérangés ou asservis, pour le bon plaisir d'imbéciles dont j'ai fait partie, et pas d'arnaque commerciale sur la «prestation» fournie, hormis le prix exorbitant pour lequel ils n'avaient pas besoin de mettre un revolver sur la tempe, quand on est assez décérébré pour être alléché par une baignade en prison et participer de près à l'exploitation d'esclaves, ça se bousculait au portillon pour les réservations à l'avance, et les enfants n'étaient pas majoritaires) ...

Et si, tout simplement, on leur «lâchait la nageoire» ?!

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EDIT : via C'est Assez ! , un article de Ouest-France du 28/08/2019, relatant les mesures restrictives prises récemment par la Nouvelle-Zélande pour limiter la nuisance envers les dauphins sauvages de la promiscuité que les « nages » leur imposent dans leur milieu naturel.
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https://www.liberation.fr/futurs/2017/05/21/marineland-ca-fait-mal-car-on-aime-nos-animaux_1571192
Ces critiques, virulentes sur les réseaux sociaux, sont difficiles à digérer pour les soigneurs.
«Ça fait mal car on aime nos animaux. Quand on boit un verre dehors, on ne dit pas qu’on travaille à Marineland»
, confie l’une d’eux.
«Je comprends que ça puisse faire mal au cœur de voir des dauphins dans les bassins. Mais, non, on ne brûle pas les yeux des otaries avec le chlore, on ne se cache pas pour faire des soins»
, rétablit Katia.
Quant au transfert des animaux de l’aquarium à la mer :
«Les hommes font partie de leur vie. Si on relâche les dauphins, il faut nettoyer leur disque dur. Cette population est domestique, elle ne peut pas revenir à ce qu’elle n’a jamais été», répond Jon Kershaw estimant que tout est question «d’état d’esprit» : «Le problème, c’est l’anthropomorphisme dont on est en partie responsable. Les anticaptivité parlent de prison. Mais ces animaux ne savent pas qu’il y a un ailleurs.»

https://www.notre-planete.info/actualites/2184-dauphins_souffrance_delphinarium


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